top of page

Claire Michard

Claire Michard est une docteure en linguistique et une sociolinguiste. Elle a travaillé au sein de l’Université de Paris puis à Sorbonne Université campus Pierre et Marie Curie. 

Elle s’est spécifiquement « interrogée à la fois sur la façon dont on pourrait représenter l’opposition sémantique des termes désignant les femmes et les hommes, […] et sur la façon dont les linguistes traitaient de la question. ». Elle a, ainsi, analysé les discours tenus par les linguistes de 1920 à nos jours.

«  Comment alors nommer les femmes et sous quel sens les faire exister dans les discours ? Il me semble que nous sommes devant un phénomène de double contrainte : soit nous apparaissons fondamentalement en tant que sexe (genre féminin), soit nous risquons de disparaître dans la référenciation sexiste et dominante du genre masculin, potentiellement générique, aux mâles. Mais cette référenciation, nous pouvons la contrôler : ce sont en effet les pratiques discursives qui construisent les valeurs référentielles. »

 

Claire Michard, « La notion de sexe en français : attribut naturel ou marque de la classe de sexe appropriée ?  », 

Langage et Société, 2003.

Liens avec notre enquête
Personnes associées

Luca Greco, Éliane Viennot, Daniel Elminger

Liens avec notre enquête

Claire Michard est une militante féministe et travaille sur « l’analyse des types d’appréhension sémantique des notions de sexe et d’humanité en linguistique. ». De ce fait, elle est amenée à discuter de l’écriture inclusive malgré le fait qu’elle ne soit pas son principal objet de recherche. 

Par ailleurs, elle considère qu’être féministe correspond « au minimum » au fait de

Concernant l’écriture inclusive, Claire Michard considère qu’elle n’est qu’une partie de la solution au sexisme présent dans la langue et au sein de notre société.

Claire Michard explique que sa « recherche a pour objet l’analyse des types d’appréhension sémantique des notions de sexe et d’humanité en linguistique. À partir de cette analyse, je tente une approche matérialiste, c’est-à-dire une approche qui articule de façon serrée rapport social de sexe, effet idéologique-symbolique de ce rapport, et sens linguistique ». Ainsi, Claire Michard poursuit une analyse matérialiste, c’est-à-dire, une analyse dans laquelle les rapports de pouvoirs existants entre femmes et hommes sont pris en considération. Elle affirme que ces rapports de pouvoir ont une influence directe sur la langue. D’ailleurs, elle considère qu’il existe un rapport d’exploitation entre femmes et hommes « comparable à certaines formes d’esclavage et de servage, comme rapport d’appropriation physique direct du corps des femmes par les hommes, […] nommé « sexage », et qui préexiste logiquement à l’appropriation individuelle dans le mariage. ». Sur le sujet, elle s’inspire des écrits de la sociologue Colette Guillaumin qui a établi le concept de « sexage ». 

 

Elle soutient que « les rapports sociaux concrets ont un effet sur le symbolique, et donc sur le langage et la langue. ». 

 

Claire Michard affirme. que que « si ces représentations [véhiculées par le langage] sont une composante intrinsèque du rapport de pouvoir et contribuent par conséquent à sa (re)production, ce ne sont pas elles qui en sont la seule origine. Cela signifie d’une part qu’il ne peut exister de domination symbolique sans exploitation concrète, contrairement à ce qui se dit beaucoup, et, d’autre part, que je considère le sexisme dans le langage à la fois comme le symptôme du rapport de pouvoir et comme l’un des moyens de sa mise en œuvre. ». Ainsi, Claire Michard soutient que faire évoluer la langue dans les représentations qu’elle véhicule au sujet des sexes ne permettra pas de mettre fin aux rapports sexistes existants. 

 

Elle soutient qu’au sein de la langue, on peut constater une « absence de construction de l’agentivité pour les objets de discours femmes et, à l’opposé, la construction répétitive de l’agentivité pour les objets de discours hommes. ». Elle a 

 

« considérer l’oppression et l’exploitation généralisée des femmes par les hommes comme une relation sociale fondatrice de la société, relation qui a obligatoirement des effets sur la production sémantique et par conséquent sur la langue. »

« interprété cette dissymétrie de construction comme le renvoi des objets de discours femmes vers les notions animées non-humaines (les animaux) et les notions non-animées (les machines, les éléments naturels). ».

Les rapports de pouvoir entre les genres ont une influence sur la langue

La langue comme symptôme et moyen de mise en oeuvre du rapport de pouvoir entre les genres

Claire Michard affirme « que les traits sémantiques de sexe et d’humanité ont des poids inverses selon qu’il s’agit des notions de femme ou d’homme et, en conséquence, du genre féminin ou du genre masculin. La notion d’homme est pleinement déterminée en tant qu’humain : /humain/ est le trait sémantique catégorisant, et /mâle/ le trait sémantique subordonné, qui détermine /humain/. Tandis que la notion de femme est pleinement déterminée en tant que femelle : /femelle/ est le trait sémantique catégorisant, et /humain/ le trait sémantique subordonné, déterminant /femelle/. ». Ainsi, elle soutient « que la dévalorisation des termes de genre féminin n’est qu’une conséquence du fait fondamental, et beaucoup plus grave, de la catégorisation des femmes comme femelles, et que le défaut de fonctionnement des masculins génériques n’est pas une question de sens, mais de référence. La référenciation discursive androcentrée des noms masculins désignant des groupes d’humains (ou des collectifs de genre masculin ou féminin, tels la société ou le peuple), que j’ai fréquemment relevée moi-même, ne permet pas de penser que le sens générique (humain, en dehors de toute spécification de sexe) du masculin n’existe pas. Si le genre masculin tracte avec lui fréquemment la seule référence au sexe mâle, c’est un phénomène contingent, une pratique discursive d’appropriation du général, mais cela n’empêche nullement le masculin d’avoir toujours comme sens premier /humain/. La capacité référentielle générique est réduite, mais elle existe potentiellement parce que le sens la permet. Tandis que le sens du féminin /femelle/ est générique du point de vue du sexe et ne peut référer qu’à l’ensemble des femelles (animales-humaines). Le sens du féminin ne permet pas l’accès à l’humain général. ».

 

Par ailleurs, elle explique que « dans la période qui va des années 1920 aux années 1970, il n’y a en effet aucune analyse sociologique des sexes et, en conséquence aucune interrogation sur les phénomènes linguistiques que l’on pourrait associer à cette analyse. ». « L’analyse socio-sémantique » que propose Claire Michard permet de palier aux défauts « du discours linguistique traditionnel, qui reconnaît des dissymétries formelles et sémantiques, et pose cependant une symétrie des signifiés du genre ». L’analyse socio-sémantique « déplace l’appréhension dominante du sens, du domaine des évidences naturelles à celui du construit idéologique inhérent aux rapports de pouvoir; elle donne au langage un statut de pratique socio-symbolique et ne fait pas de la langue une entité métaphysique coupée de ses agents sociaux. ».

Ressources 

Une dévalorisation des termes de genre féminin

Ressources

Armengaud, Françoise. « Claire Michard : Le sexe en linguistique. Sémantique ou zoologie ? » Nouvelles Questions Féministes. 2003. N°1. Pages 138 à 143.

Michard, Claire. « Humain / femelle : deux poids deux mesures dans la catégorisation de sexe en français ». Nouvelles Questions Féministes. 26 novembre 2011. Volume 20, n°1. Pages 53 à 95.

Michard, Claire. « Genre et sexe en linguistique : les analyses du masculin générique ». Mots. Les langages du politique. 1996. Volume 49, n°1. Pages 29 à 47.

Michard, Claire. « La notion de sexe en français : attribut naturel ou marque de la classe de sexe appropriée ? ». 2003. N°106. (Langage et société).

Michard, Claire. Le sexe en linguistique. Sémantique ou zoologie  ? L’Harmattan. 157 pages. (Bibliothèque du féminisme).

Michard, Claire. Ribéry, Claudine. Sexisme & Sciences humaines, Pratique linguistique du rapport de sexage. Presses Universitaires du Septentrion. 2008. 204 pages. (Linguistique). 

Michard, Claire. Viollet, Catherine. « Sexe et genre en linguistique – Quinze ans de recherches féministes aux États-Unis et en R.F.A. ». Recherches féministes. 1991. Volume 4, n°2. Pages 97 à 128.

bottom of page